ALGERIENNE KABYLE IMMIGREE
par Nedjima PLANTADE
Louisa A., une femme de notre entourage personnel, aujourd’hui âgée de soixante-deux ans, a quitté sa Kabylie natale à trente-trois ans en 1960 pour suivre son mari en France avec ses quatre enfants. Les relations de réelle connivence que nous pûmes établir puis développer avec elle depuis fort longtemps, nous conduisirent il y a quelques années à lui formuler la délicate proposition de consigner sa vie sur des bandes magnétiques, qui constitueraient peut-être plus tard les pages d’un livre. A notre grande surprise elle trouva l’idée plaisante, nous avouant du même coup la nourrir secrètement elle-même tout en regrettant amèrement de ne pouvoir la concrétiser faute de ne savoir « ni lire ni écrire », selon sa propre expression. Cette conjonction de deux désirs, le sien et le mien aboutit à plusieurs dizaines d’heures d’enregistrement en cours de transcription et de traduction dont le texte présenté ici constitue le tout début du récit. La plupart des évènements relatés dans ce court fragment se déroulent en période ante-migratoire, à l’époque de ses premières années de femme mariée et de mère. Le caractère presque anarchique de la narration apparaît d’emblée à travers le brouillage de la chronologie, les nombreux retours en arrière, bref toutes les fantaisies d’une mémoire qui se donne libre cours. Ce désordre inhérent à tout récit de vie débutant provient du sentiment du narrateur de « ne pas savoir par où commencer » : il est amené alors à débuter par « un bout » pour pouvoir ensuite, à partir de ce point de départ, prendre un fil conducteur. Ce n’est qu’au cours des nombreuses séances d’entretiens suivantes que notre narratrice parviendra à produire un récit plus respectueux de l’ordre chronologique des faits.
Il convient pour l’heure de considérer ce texte comme un simple matériel brut dont l’analyse reste à faire.
Les quelques trente-trois heures d’entretien actuellement en notre possession sous forme de cassettes se déroulèrent entre 1986 et 1988. Ces rencontres eurent lieu au gré de nos disponibilités personnelles et de celles de Louisa A., c’est-à-dire très irrégulièrement mais toujours chez celle-ci. Les entretiens débutaient généralement par une conversation libre qui laissait ensuite émerger plus ou moins tardivement le récit de vie. Il arriva que des entrevues n’aboutissent pas à la production souhaitée, se limitant à des conversations ordinaires. Les séances les plus fructueuses furent celles où nous n’eûmes pas à intervenir sauf pour rappeler à la narratrice, lorsqu’elle le demandait, l’épisode conté lors de l’entrevue précédente ; en effet, nous avions convenu dès le départ de donner un déroulement chronologique au récit.
Née en Petite Kabylie, elle est la benjamine d’une fratrie composée de dix filles et deux garçons. Son père décède lorsqu’elle atteint l’âge d’un an ; elle passe une enfance heureuse auprès de son grand-père paternel affectueux avec elle. Dès l’âge de huit ans, elle commence à travailler pour aider à pourvoir à son trousseau car elle est issue d’une famille pauvre (son père travaille dans une ferme coloniale et par la suite ses deus frères également). A douze ans, elle perd sa mère dont elle ne se consolera jamais ; elle est surprise à cette période en train de pleurer sur sa tombe ou d’y dormir. Avant sa mort, la mère refuse plusieurs demandes en mariage pour sa « petite dernière » qu’elle veut garder auprès d’elle le plus longtemps possible. Mais elle est promise puis mariée par son frère aîné, à l’âge de dix-huit ans, contre la volonté des autres membres de la famille. Son mariage avec un homme qu’elle connaît déjà un peu (enfant, elle travaillait chez sa famille au ramassage des olives) la plonge dans une grande angoisse à cause de la puissance de sa future belle-famille, riche en hommes et en biens.
Installée dans la belle-famille, cette jeune femme de dix-huit ans commence la période la plus importante de sa vie, durant laquelle elle doit s’y faire sa place et où le patriarche sème la terreur sur des fils, ses brus, ses petits-fils et maintenant elle-même, première « petite-bru ».
Cette vie se déroule dans une ferme exploitée en métairie comptant une grande famille, de nombreuses bêtes et même des chevaux. Les terres donnent de l’orge mais aussi du blé, des olives; des figues. Ici les femmes abattent un travail dur et considérable et sont mal nourries, ce qui les conduit parfois à des larcins de denrées et amène les représailles de la belle-mère ; nous sommes au lendemain de la seconde guerre mondiale où les bons d’alimentation restreignent la consommation.
Au moment où la guerre d’Algérie éclate, elle a trois enfants. Son fils aîné, alors âgé de sept ans, est maltraité et corvéable à merci par ses oncles paternels. C’est durant cette période tourmentée, mais non à cause d’elle, que cette femme réussit à décider son mari de l’emmener avec lui en France. Les motifs qui la poussent à s’exiler sont issus des conflits répétés avec les frères de son mari, pour lesquels elle n’est qu’une servante au « mari absent ». Lorsque le départ est annoncé au grand jour, c’est le scandale pour les uns, le malheur pour les autres, la jalousie aussi pour d’autres encore. Sont relatées toutes les attitudes possibles devant l’exil d’une famille qui est une tout autre affaire que celui d’un seul homme. Du côté des femmes, on tente par des moyens divinatoires de savoir si le voyage se passera bien ou s’il conduira à la mort. Les croyances traditionnelles relatives à la France, pays sans soleil, à la fois inhospitalier et matériellement facile, sont rapportées avec une précision que seule une mémoire forgée par la tradition orale sait entretenir. Le grand-père, lui, est effondré par le projet de départ et « pleure comme une fillette ». La candidate à l’exil relève le défi et reste déterminée face à toutes les menaces, qu’elles soient réelles ou imaginaires, puisqu’elle préfère mourir en mer et être dévorée par la faune marine que rebrousser chemin et revenir en situation d’échec.
Le voyage en bateau est une épreuve pour elle et ses enfants qui hurlent de peur en voyant la mer pour la première fois. Ils sont malades durant tout le voyage, même dans le train qui les mène de Marseille à Paris. C’est un taxi qui les transporte de la gare de Lyon à Aubervilliers où les attend un petit logement désaffecté que leur offre le beau-frère du mari, en attendant de trouver un véritable logement. Ils passent deux ans dans un petit espace situé dans la cour du pavillon du beau-frère et comprenant deux petites pièces dont l’une est minuscule, sans eau ni gaz, ni chauffage. C’est dans ces conditions que les trois aînés des quatre enfants affrontent l’école, sans connaître un mot de français, ni même savoir chausser leurs pieds habitués à la nudité. La période d’adaptation est difficile car ils doivent subir plusieurs séries de vaccinations obligatoires qui les obligent à garder souvent le lit, de même que des allergies cutanées apparaissent, conduisant la mère et le fils aîné à l’hôpital. Cette période d’adaptation du corps au nouvel environnement n’empêche pas les enfants de bien travailler à l’école et d’apprendre vite le français. Ces deux années de cohabitation avec la sœur du mari sont sources de conflits quotidiens, et le beau-frère en arrive à chasser cette famille par voie judiciaire. C’est durant ces deux années également que certains évènements de la guerre d’Algérie sont vécus de manière vive.
Après bien des difficultés, le mari achète un deux-pièces-cuisine situé dans la cour d’un immeuble du début du siècle. Il doit emprunter pour le payer et fait travailler son fils aîné pour l’aider au lieu de lui offrir une formation professionnelle. Son épouse est heureuse d’être enfin chez elle, embrasse le sol de l’appartement en y pénétrant pour la première fois et remercie Dieu et ses Saints pour cette faveur. Durant la durée de remboursement du prêt, la vie quotidienne est extrêmement difficile et les enfants sont mal nourris. Cette situation dure deux ans au bout desquels un sixième enfant vient au monde suivi d’un septième et dernier dix-huit mois plus tard. En plus des neuf personnes occupant ces deux pièces, le mari, contre la volonté de son épouse, héberge durant plus de deux ans et à tour de rôle, deux de ses frères plus jeunes, travailleurs en France.
C’est seulement à partir des années 1970 que la mère peut sortir pour emmener ses enfants jeunes à l’école maternelle ; jusque-là son mari lui interdisait de mettre les pieds dehors craignant le regard des hommes de leur village qui iraient raconter que sa femme sort dans la rue. Elle doit affronter aussi une autre manière de concevoir la maternité en accouchant en clinique, où les rapports avec le personnel soignant sont des plus difficiles à cause notamment de son ignorance totale de la langue française.
Entre 1972 et aujourd’hui, les enfants ont poursuivi leurs études, trois sont mariés, une fille médecin vit seule, les trois derniers, ceux nés en France vivent encore avec leurs parents. Le bilan qu’elle dresse de sa vie est assez amer : elle pense avoir mal vécu. L’espoir qu’elle avait mis dans son émigration la déçoit à cause de ce qu’elle a fait de ses enfants et des valeurs kabyles dont ils ne tiennent plus compte. Il ne reste que la religion et la prière à cette femme qui a toujours été très pieuse, généreuse, accomplissant ses devoirs de bonne musulmane. Elle développe une attitude philosophique devant la vie, reconnaissant parfois la liberté individuelle, mais acceptant mal ses conséquences.
La transcription adoptée tente de restituer la parole au plus près tout en sachant l’impossibilité de rendre le paralangage, c’est-à-dire les aspects non sonores tels que les gestes, les mimiques, les hésitations, etc. Par ailleurs; elle semblera parfois incohérente et passer tour à tour d’une notation phonétique à une notation phonologique ; ce compromis, bien qu’il pose des problèmes permet d’éviter l’écueil de l’illisibilité d’une transcription purement phonétique. Si nous avons adopté la notation phonologique usuelle du kabyle, c’est parce qu’elle tient compte de règles qui clarifient la structure syntaxique ; ainsi certains composants qui sont assimilés dans le discours oral sont rétablis ici. S. Chaker a procédé à un inventaire de ces phénomènes d’assimilation auquel nous renvoyons le lecteur (1). D’autre part le parler de la narratrice dégage, même pour un familier du kabyle, une certaine étrangeté qui trouve son explication dans l’origine « petite kabyle » de cette femme dont le village, sis à une vingtaine de kilomètres au, Sud-ouest de Béjaïa présente, comme dans la région environnante cette abondance particulière de l’affriquée alvéolaire sourde /ţ/ A signaler également la place du pronom personnel autonome /t/, masculin/ ou tt, féminin/ par rapport au verbe : d’ordinaire, dans le cas du futur, il passe devant le verbe, or, ici, il lui demeure parfois postposé.
L’immense confiance dont nous fûmes toujours investie ne put dissiper un doute venant parfois ternir cette relation ; rapporterions-nous fidèlement sa parole ? Cette question doublement pertinente provient premièrement d’une impuissance (elle ne possède aucune possibilité de contrôle du texte final), deuxièmement d’un sentiment vague quant aux distorsions inévitables opérées dans le passage du discours oral au discours écrit; compliquées encore par le travail de traduction d’une langue très éloignée du français et qui aboutit à une véritable re-création. Mais la tentative, de maîtrise de ce vaste ensemble de paramètres relève du souci de l’ethnolinguiste, la narratrice, elle, ne se préoccupant que du contenu de son discours. Notre traduction ne fait que tenter de respecter ce souhait de fidélité sémantique; elle s’éloigne par conséquent d’une traduction littérale, pour demeurer au plus près de « l’idée exprimée » plutôt que de chercher à restituer une réalité linguistique.
Lorsque j’étais petite, à l’âge de douze ou treize ans, ma mère décéda, je vécus alors avec la femme de mon frère. Je ramassais des câpres, quand j’en revenais, « Va chercher de l’eau ! » puis, « Va chercher des fagots », jusqu’à ce que j’atteignis l’âge du mariage, on me donna ici [en mariage], je ne voulais pas, je pleurais… Mais en l’absence de ma mère, à qui ferais-je de la peine ? La femme de mon frère ? Ce n’était pas son problème, elle cherchait plutôt à se débarrasser de moi.
Lorsque j’arrivai chez ceux-là. J’ai trouvé une belle-mère avec huit enfants: « Va peigner la fille, va donner à manger au garçon, va lui laver ses vêtements, va traire la vache, va rassembler les agneaux, va préparer la litière des bêtes, va traire les chèvres, va baratter le beurre, va chercher des fagots, va ramasser la paille pour les bêtes, remonte l’orge du silo que nous moulions, tamise la semoule, mets-la dans la marmite… Travailleurs, paysans, ceux de la maison, nombreux comme des sauterelles…Le grand beau-père qui nous donnait l’huile au compte-goutte… Nous rêvions de pain ! Fatigue … pas de savon pour laver notre linge, saleté… Comme ils étaient nombreux à la maison !
Seul Mohand prenait les décisions et faisait le marché, il était le Dieu ; son père d’un côté, lui de l’autre. Par Dieu vénéré, je ne trouvais de la semoule de blé que lors des visites chez moi, ou lorsque ma belle-sœur m’en apportait: nous faisions alors des pâtes fraîches, des crêpes … Sinon, nous les ignorions, sauf l’accouchée. Les vêtements : pas de savon sauf celle, dont le mari pouvait en chaparder un peu pour le lui rapporter…Les poux, les pièces pour raccommoder, literie de sacs de toile de jute, portage… Nous remontions des silos et portions sur notre dos, nos épaules étaient irritées.
Par Allah, je me souviens lorsque naquit ma fille ainée, il pleuvait des cordes, j’ai cru que le toit s’écroulerait sur moi. Personne pour rester près de moi. Mon mari était parti à Aghbalou pour me rapporter mes affaires, et fut bloqué là-bas, le fleuve était en crue et il était impossible de passer. Tamellaht me dit: « Par Allah, si la crue a emporté Meqqran, par Allah, je jetterai cette fille dans le foyer, je la prendrai et la jetterai dans les braises, inutile de la pleurer, elle ne me plaît pas, on l’attend pour fêter le septième jour, et il n’est pas là ! «
Deux ou trois jours passèrent avant que la pluie ne cesse, il traversa, il revint.
Quand il fut là, je lui dis :
– La voici Nanna Tassadit, tu ne la jetteras pas dans le foyer, ah !
Je regardais, quand je voyais passer une ombre, je me réjouissais pensant que quelqu’un me portait peut-être quelque chose à manger ou une goutte de café … rien !
Venait une des filles de Mohand, elle me disait :
– Que prépare t-on ?
Je lui répondais :
– Prends des pâtes ou du couscous !
Tu nous en laisseras un peu ou bien préparons-nous la marmite seulement pour toi?
Le moulin à bras était hors d’usage et nulle part où faire moudre, ils mouraient de faim. Je lui disais :
– Va, prends pour toi et donne-m’en un peu. Prépare la timhemmezt ! (2) pour les enfants.
Un jour, il entra et dit :
– Pourquoi as-tu fait remplir un tamis à Fatma ?
– Il n’y a rien ! Elles ont préparé la marmite depuis ce matin…
– Que le mauvais sort s’abatte sur toi, celle qui se fait berner par les femmes, si c’était moi, même si le train leur passait dessus, je ne leur aurais pas donné autant, tu crois peut-être qu’elles en tiendront compte … Tu te rappelles lorsque tu observais désespérément la porte, personne ne s’est soucié de toi, on ne t’a pas même porté un bout de pain d’orge, et maintenant tu leur donnes ce que ta famille t’apporte !
– Mieux vaut Dieu, laisse-les donc, si Dieu le veut, tout ce que je laisse, il me le donnera en santé, je leur donne peu importe !
Puis il ne plut assez longtemps. Nulle part où aller puiser la moindre goutte d’eau. Rien … ! Je demandai à la femme de Dadda Slimane (paix à son âme} Nanna Tawes, et lui dis :
- Envoie-moi une cruche d’eau !
Lui, lorsqu’il emmenait boire les bœufs, il me la remplissait à la fontaine, elles, elles barattaient le beurre et prenaient la neige {les fientes des oiseaux sur le toit, j’étais écœurée par la neige fondue). Il allait me la remplir, venait la femme de Mohand, elle était enceinte de Brahem.
- Me donneras-tu un peu d’eau, Louisa ?
(« Bon sang, où pourrais-je m’enfuir ! Même l’eau est quémandée ! »), J’en donnais une tasse, elle buvait et allait dire à une autre :
– Moi, j’ai bu de l’eau de la fontaine dans la chambre de Louisa !
- Ne m’en donneras-tu un peu à moi, Louisa ?
Par l’envoyé d’Allah, elles n’ont cessé de m’ennuyer, la cruche était rapidement vide. Il me disait alors :
Que le malheur s’abatte sur toi ! Je t’avais bien dit que c’était pour toi, pour les intestins malades, elles, elles peuvent recueillir l’eau des gouttières, et faire fondre la neige, laisse les manger, elles ont faim, elles sont en bonne santé !
Je lui disais :
– Laisse-les donc, donne-leur, c’est Dieu qui leur donnera le malheur !
Un jour, elles balayaient, cela faisait dix-huit jours que j’avais accouché de ma première fille, elles balayaient l’écurie de la jument, je pouvais voir comme ici maintenant, elles bouillonnaient : « bla, bla, bla », quant à moi je sentis monter un noir sentiment, je dis :
Que dites-vous ? Il faut que je vienne balayer ? Vous êtes-vous levées avant quarante après vos accouchements ? J’étais présente : est né Omar, est né Brahem, est né Rabah, est né Bezza, est née Betitra, aucune d’entre vous ne s’est levée avant ses quarante jours pour balayer l’étable ! Et moi je devrais venir balayer ! C’est à mon propos que vous papotez maintenant, vous me privez de nourriture, vous m’oubliez même, je suis obligée de préparer moi-même de quoi manger, et il faudrait en plus que je descende à l’étable balayer! Aldjia dit:
– Oooooh ! Ma sœur, nous parlions simplement, depuis quand écoutes-tu, qu’as-tu entendu !
– Vous disiez « Elle mange et se prélasse » ! Je me prélasse ? Que me donnez-vous dans votre maison, je me nourris de ce que me porte ma famille, seulement ce qu’elle me porte ! J’enfilai une robe par dessus celle des couches et
courus prendre un panier…
– Aaaa… ! Ta fille deviendra noire, elle aura de l’eczéma !
– Dieu fasse que le mauvais esprit lui torde le cou! Quand mes parents m’offrirent à un tel feu, je savais ce qui m’attendait ! Remplissez que je porte !
J’allais ramasser avec mes mains, Tamermacit (3) fit semblant de jurer, que Dieu lui ferme les yeux, d’ailleurs il les lui a fermés !
– Par celui-ci et par celui-là, tu ne ramasseras pas la bouse avec tes mains? Tu es une accouchée qui n’a même pas atteint vingt jours !
– Donne-moi ça, je t’en prie !
– Bon alors, tu vas plutôt porter, tu ne ramasses pas avec les mains, l’urine et tout !
J’y allais alors tant et plus jusqu’à faire quatre écuries : la jument, les bœufs, les moutons, les ânes : le soir venu je fus prise de fièvre, frappée à n’en plus pouvoir,
à cause de toute la fatigue: Le lendemain, ma porte ne s’ouvrit pas une seule fois. Il (mon mari) sortit au petit matin, la porte resta fermée, jusqu’aux environs de onze heures, voici Aldjia :
– Aujourd’hui cette porte ne s’ouvrira pas ?
Je refusai de répondre, elle entra, franchit le seuil :
– Ooooh ! Elle n’est pas du tout levée !
– Si vous tenez à Dieu, celui qui vous a créées, laissez-moi donc tranquille, ne m’adressez pas la parole!
Comment je fis : j’envoyai Tamellaht à Ahmmam en lui disant ce qu’elle devait faire ; est venue Tata, la fille de Dadda Slimane, je lui fis porter dans un panier la semoule qu’ils m’avaient apportée auparavant, elle l’emporta. A Ahmmam, elles me préparèrent des crêpes et des pâtes fraîches. Quand je les faisais cuire, venait Aldjia, recouverte d’une robe, elle s’asseyait près du foyer pour manger, de temps à autre une bouchée ; elle était enceinte de Brahem. Lorsqu’elle sentait la graisse dans la petite marmite en terre, elle s’affolait et venait étendre ses pieds près du foyer. Alors que c’était l’hiver, pas de bois, rien, seul mon mari me rapportait quelques brindilles, elle attendait là jusqu’à ce que je découvre ma petite marmite pour manger, et elle mangeait alors avec moi.
La fièvre ne me lâcha pas durant vingt-quatre jours; quand vint le quarantième jour, la sœur de Dadda Slimane vint (le quarantième jour, les parents de l’accouchée viennent lui porter afţţet (4) ), elle avait plus que rempli son panier, elle savait qu’elle avait affaire à une maison de sauterelles; il y avait aussi trente œufs, de la graisse séchée, de la menthe, tout, ma grande belle-mère prépara des galettes aux œufs bouillies, ils mangèrent en grande quantité, la femme de Dadda Slimane me disait :
– Qu’est-ce-donc que ces affaires-là?
Je lui racontai tout, de bout en bout:
– Par l’envoyé d’Allah le beau, par Sidi Bachir ou Ldjudi, si j’avais su, je ne serais pas venue, j’aurais envoyé chaque matin Tata ou Fatima avec un panier de crêpes chaudes, d’afţţet chaud ! J’ai donc porté ce dont ils vont, eux, se bâfrer, et en plus tu leur donnes de ta semoule ! Eux, ils mettent des turbans à leurs silos, et on te demande un peu de semoule pour faire la galette levée du grand beau-père, elle se moque de toi!
Je fus longtemps fiévreuse, j’avais attrapé froid durant mes couches, le vent qui soufflait lorsque nous franchissions la porte, le panier sur le dos, me faisait courber jusqu’à terre ; le soir venu, la fièvre m’attendait et je passais des nuits blanches, et ma fille qui pleurait sans arrêt, pas de lait, rien, mais Dieu pourvoit : je guéris sans sorcellerie ni amulettes. J’ai attendu Dieu jusqu’au rétablissement ; le lait est revenu, la santé aussi, tout revint …
Beaucoup plus tard, je fus enceinte pour la quatrième fois, mon mari voulait partir en France, il me fit subir une misère noire. Dadda était venu pour me ramener chez lui en congé, il s’adressa au grand-beau-père et lui dit:
– Vous lui permettrez de revenir séjourner un peu à la maison !
– Ah ! Mon fils, pas encore, ceci, cela, la caroube va tomber, il faut la ramasser!
– Ah ! Dda Chérif, un an, vous pouvez bien la lâcher au moins quinze jours!
Il leur avait porté un panier de raisin, ils étaient un peu gênés, le vieux lui dit :
– Va; elle viendra dimanche.
Quand dimanche fut là, mon mari m’emmena. Jamais il ne me dit mot de son projet de partir en France. Il prit la route vers la France et me fit porter la clef de mon coffre par mon fils aîné qui l’apporta au milieu de la journée, le pauvre, il arriva, il ressemblait à un dément, la femme de Dadda, la pauvre, lui lava les pieds, le visage, lui donna à manger, et dit, amère:
– C’est ça la vie ?
Mes yeux se remplirent de larmes, je les refoulai à plusieurs reprises pour ne pas pleurer et dis :
– Mon fils, où est ton père ?
– Je ne sais pas, il m’a donné la clef en me disant de te la porter le lendemain!
– Alors il ne reviendra pas ce soir ?
– Voilà deux jours qu’il n’est pas là.
Après huit à dix jours de séjour, on apprit qu’ils disaient: « C’est pour cela qu’il a emmené sa femme chez sa famille, lui, est parti en France, maintenant il lui enverra des mandats pour qu’elle profite! » Les premiers jours, la femme de Dadda se réjouissait de ma présence chez elle : si je ne disais pas ce qu’il fallait préparer pour le repas, elle me demandait : « Que faisons-nous pour le dîner Louisa, pour le déjeuner? » jusqu’à ce que je dise ce que je voulais. Mais quand elle entendit les paroles des autres, elle crut qu’elles étaient vraies et ne me demanda plus ce que je désirais manger ; son visage se fermait parfois, et elle frappait souvent et injustement sa petite Titem, Et moi je partais dans la chambre en contrebas pour me soulager seule par les larmes, je descendais à la chambre en contrebas, c’était là que je pouvais pleurer tout mon saoul, jusqu’à ce que mes yeux deviennent exorbités et bleus. Venait Nanna Zineb qui me disait :
– Qu’est-ce-que cette honte que te fait subir Meqqran, Louisa, qu’est-ce-que ces monstruosités ?
Nous parlions toutes deux ensembles et nous taisions lorsque surgissait la femme de Dadda de peur qu’elle pense que nous parlions d’elle.
Le temps passa; jusqu’à la réception de sa lettre qu’il adressa à Aghbalou à son père à qui il dit: « Il faut aller chercher ma femme et mes enfants, ne les laisse pas à Amasin, car Mohand risque de la frapper comme il l’a déjà fait ».
Plus tard, Dadda Slimane alla au marché (que Dieu lui pardonne s’il a fait quelque chose qui mérite le pardon, sinon que l’au-delà lui soit pénible), il rencontra le grand beau-père qui lui dit :
– Meqqran n’est pas là, Akli demande sa bru pour la ramener à Aghbalou, cette fois-ci elle ne reviendra pas chez moi, elle ne reviendra pas à Amasin !
(Aaaa … mes poulets laissés à Amasin, mon fils laissé à Amasìn, mes affaires, je n’avais rien pris avec moi, comment aller à Aghbalou ainsi?)
Après réflexion! Il lui dit :
– J’enverrai Amara.
Il envoya Amara, il partit me chercher mes affaires à Amasin, Ils construisaient une fontaine là où il n’y avait que boue et rien d’autre ; ils prirent un maçon qui construisit la fontaine. Les poulets, impossible de les compter tant elles en avaient, moi j’en avais quatre, elles prirent ma poule, la mangèrent, c’est ma poule qu’elles attrapèrent, égorgèrent, par l’envoyé d’Allah, c’est la mienne qu’elles prirent en disant :
– Ah ! Tu crois qu’elle va rentrer? Qu’elle ne revienne jamais ! Maintenant qu’elle est partie, attends, nous aurons au moins ses poules!
Si Dawya lâchait les siennes, on croirait à des chèvres, c’est incroyable, elles prirent et emmenèrent ma poule à la fontaine, la sacrifièrent, la rapportèrent à la maison et la mangèrent! Quand elles me renvoyèrent mes trois poules, je dis :
« J’en ai une quatrième, où qu’elle soit je la veux ! «
La femme de Dadda :
– « Louange Dieu qu’elles ne t’aient pas égorgé ton fils ! Tu pleures pour une poule, tu les as laissées à tes belles-sœurs et à ta belle-mère, tu savais ce qui pouvait t’arriver ! »
L’affaire fut close, elles la mangèrent, mais pas de pardon auprès de Dieu.
Je revins à Aghbalou et laissai Amasin, Amara vint. Il m’apporta mon matelas sur un coin du panier porté par l’âne, l’alfa s’éparpilla à l’intérieur du matelas et forma des boules, il était aussi très sale, il l’apporta et me dit:
– J’ai eu honte de porter ce matelas depuis Amasin jusqu’à Aghbalou !
(Car il devait passer par Al-Kseur). Il l’apporta quand même, j’y couchai après avoir lavé la toile et l’alfa, la toile devint belle, jamais on n’aurait pu croire qu’il s’agissait du même matelas (mon matelas c’était mon âme) ; mon fils vint me rejoindre. Celui qui s’en remet à Dieu ne tombera pas, (c’est ce que je me dis parfois) ; je disais : « O Dieu, elles qui cherchent à me faire mourir de faim, que Dieu les laisse au pain noir, sur lequel tombe même le crottin des moutons, moi, oh mon Dieu, tu vois tout, mon cœur est pur, mon cœur est propre, j’ai travaillé pour le jeune, pour le vieux, pour le moyen et les autres, je m’appuie sur toi, mon Dieu, peut-être m’offriras-tu le pain lisse ! Finalement, elles y sont encore, et moi me voici, Dieu traça mon chemin, m’apporta son aide, merci mon Dieu, je peux prendre le pain avec mes propres mains, le rompre pour mes enfants sans le regard de personne !
J’allai donc à Aghbalou, y travaillai jusqu’au milieu de la nuit, quelqu’un frappa à la porte, nous l’ouvrîmes, nous le trouvâmes, il était de retour, on lui dit:
– Quelle folie, seulement six mois, tu ne fais que l’aller-retour ?
Il dit :
– J’ai su que grand-père vous a chassés, etc …
Son grand-père lui dit:
– Je la chasserai, je chasserai Akli et ses enfants, nul n’a de droit sur Aghbalou, s’il le garde là-bas, ici à Amasin il y a du travail, sa femme ne pouvait rester ici, maintenant il est parti là-bas, c’est moi qui les nourris, je les affamerai, pas question de leur donner du pain pour les nourrir …
Peu à peu, je ne sais s’il s’écoula un an ou deux, éclata la guerre … nous allâmes nous réfugier à Amasin, ainsi est le destin de Dieu, mon mari finit les moissons à Aghbalou et termina les bottes de paille, nous prîmes le chemin d’Amasin (un peu à cause de la guerre, un peu pour les aider). J’allai donc là-bas et trouvai les chambres pleines à craquer : laquelle de tonneaux, laquelle de sacs de céréales empilés ; elles, elles, occupaient leurs chambres respectives. J’étais restée quinze jours dans ma famille, c’est là-bas que je fêtai l’Aïd, il était interdit de bien habiller les enfants, nous avions peur de nous faire égorger par les moudjahidines, pas de henné, rien. La femme de Dadda, 1a pauvre, disait :
– Comment allons-nous habiller les filles, comment faire ?
– Attends la mi-journée nous verrons!
Mohand entra et me dit :
– Ces filles vont rester sales ainsi ?
– Nous avons peur!
Puis Yamina les habilla, ses filles et les miennes. Après huit à dix jours, l’Aïd passa. Nous retournâmes à Amasin, Yamina me confectionna des beignets pour les emporter. En arrivant je trouvais toutes les pièces occupées, où vais-je m’installer avec mes enfants ? Rien, Le vieux revint des champs, il nous trouva dans la cour à nous reposer au soleil près du silo, il me dit :
– Ah ! Tu es assise Louisa ! Crois-tu qu’il te soit permis de te reposer?
– Nous nous racontons des histoires !
– Va plutôt préparer une chambre où vous pourrez dormir !
Les sacs pesaient au moins 120 à 140 kg, avec l’aide de Dawya, allez, allez, allez jusque tard dans la nuit, je réussis enfin à obtenir une chambre. Quand j’étalai la couverture sur le sol, impossible de dormir! Les punaises nous empêchèrent de fermer l’Oeil. Au petit matin, je pris un tamis et allai creuser la terre, une terre blanche comme du plâtre et très difficile à ramasser. Puis je l’ai écrasée, réduite en poudre bien fine, tamisée, pris de la bouse de vache et j’ai mélangé le tout énergiquement, j’en enduisis la chambre en un jour, elle prit un aspect engageant, le grand-beau-père dit:
– Je vais m’y installer !
Il dit simplement cela en passant, mais comme il lui vint aux oreilles que je n’étais pas d’accord, il se tut. Je m’y installai pour deux ou trois mois jusqu’au nettoyage complet de l’aire à battre, nous reprîmes le travail habituel, préparer les repas des travailleurs saisonniers, ceci, cela, jusqu’à l’empilage des bottes de paille. Quelques jours passèrent, les figues commençaient, on en gaula, on en mit à sécher, nous n’allions pas à l’aire à battre, car il y avait encore des travailleurs. Après leur départ, c’est nous, les femmes, qui allions retourner les figues sur les claies de diss, de nattes, etc … Aldjia me dit:
– Viens! Toi et moi, nous irons, Dawya préparera la marmite à ma fille qui roulera le couscous.
Nous allâmes toutes deux ranger les claies, le grand-beau-père me regarda et me dit :
– Tu es venue ranger les figues !
Je ne dis mot car lui est grand-beau-père et je ne savais quoi lui répondre, il me dit:
- C’est à toi que je parle, pose ces claies !
Aldjia lui dit:
– C’est moi qui lui ai dit de venir pour les ranger car nous craignons la pluie!
– Les oiseaux mangent les figues qui tombent par terre, ce sont les bêtes qui les mangent, personne ne les ramasse, ton mari est parti se balader, toi tu viens ranger celles qui sont là, à la maison ! Ne touche pas à celles-ci, c’est moi qui les rangerai !
Je fis mon travail avec Aldjia. Nous revînmes, dînâmes, nous nous tûmes et voilà¡ Le lendemain matin, nous nous levâmes, deux s’occupèrent de la cuisson (une du tajin à pain, l’autre de la cuisson du repas), deux partirent ramasser les figues, les travailleurs étaient repartis et nous restâmes entre nous, les figuiers étaient à nous, Aldjia et moi partîmes, laissant Dawya et Khukha s’occuper du repas, Khukha était jeune et s’initiait, Btitra se vît confier la tâche de la fontaine, bref chacun avait du travail. Nous ramassâmes les figues qui restaient, les fraîches nous les rapportâmes pour la consommation directe, celles qui commençaient à sécher, nous en remplîmes un demi-panier, bref nous rapportâmes tout ce que nous pûmes sans rien gaspiller, Arrivées à la maison, nous les déversâmes dans le tamis; Aldjia dit :
– Louisa, par Dieu, réfléchis, va plus bas pour verser ces figues sur une claie!
Où que j’aille je le trouve ! Mais il était inoccupé, toute la journée à se prélasser au soleil par-ci, par-là comme une toupie. Je descendis sous le poulailler, je le
vis, j’allais rebrousser chemin, j’eus peur car je savais ce qu’il ferait, il se retourna, me vit et se retourna, j’avançai tout de même, ouvris la porte, entrai. Comme j’allais les verser, il me tira le panier, le lança, les figues s’éparpillèrent sur le sol, il me dit:
– Je n’ai pas besoin que tu pénètres ici !
- Pardon, j’ai tort, je les ai trouvées et ramassées, les biens se plaignent à Dieu!
Je revins à la maison et pleurai tant que je pus, les figues ne franchirent pas ma bouche. Dawya me dit :
– Qu’as-tu à tenir compte de lui !
– Il m’a fait déjà des reproches hier, je n’ai rien dit, maintenant il m’arrache le panier de figues des mains!
– Laisse-le, les biens, c’est Dieu qui le frappera !
– Penses-tu ?
Je refusai de me nourrir de la journée, elles:
– Ah ! Cette nourriture ne t’a rien fait, c’est injustice !
- Elle ne veut pas descendre !
Elles préparèrent une potée de potiron qui resta dans la cour au soleil. Ma fille pleurait, je me levai, pris une assiette et allai me servir, quand je soulevai le couvercle, il entra et dit :
– Tu as remonté tes manches ah ! Tu vas donner à manger à tes enfants ! Tu connais tes enfants, leur père se balade !
Je ne dis mot.
– Si ce n’était point injustice aux yeux de Dieu pour ces enfants innocents, je te verserai le contenu bouillant de cette marmite sur la tête !
Tout de même je portai de quoi nourrir mes enfants ; j’étais enceinte, j’allai pleurer encore, encore et encore, voici Nanna Rosa, que Dieu lui pardonne, elle vint de Irezman en visite, c’était l’été, elle me trouva en larmes :
– Ooooh ! Si j’avais su, je ne serais pas venue (car Nanna Rosa m’aimait énormément). Mon père ne, changera pas, il a toujours été ainsi, mon père, depuis la mort de ma mère, a acquis sept visages … !
Elle pleura avec moi la pauvre (que Dieu lui ait réservé le paradis), elle jura jusqu’à ce que je mange de ce qu’elle avait apporté, des galettes feuilletées, je mangeai. Nous rîmes, car elle était comique, quand elle parlait, nous pissions dans nos pantalons, elle s’habillait en homme … Ah ! Les femmes !
NOTES
1. S. Chaker, « Problèmes de phonologie et de notation du berbère », in Textes en linguistique berbère, CNRS, Paris, 1984.
2. Timhemmzet, appelé aussi seksu n tafuyt. Il s’agit d’un couscous au grain plus gros que celui du couscous ordinaire, mais moins que celui du berkukes et auquel on a ajouté du beurre et du jaune d’œuf.
3. « Tamermacit » est une péjoration de « Taberbacit » par assourdissement des deux labiales. Il s’agit d’une femme originaire de Barbacha, en Petite Kabylie.
4. Afţţet est une pâte grillée d’abord, bouillie ensuite avec des œufs, des tomates et des oignons. En Grande Kabylie, on l’appelle acebbwaḍ.
Asmi lliɤ ḍ-ţabezṭuḥt, saiε tnac neɤ tleṭṭac n sna, temmut yemma, qqimeɤ dd imir ɤ tmeṭṭut n gma. Leqṭeɤ akabbar, add welliɤ g kabbar, « ṛuḥ awy dd aman! »; A dd awiɤ aman, “ ruḥ awi dd isɤaren… “, almi dd wweṭeɤ i jjwaj imir nni, fkan yi ɤer dayi; Ggummaɤ, ţţruɤ… meεna ulac yemma, menhu ara ɤiteɤ? Tameṭṭut n gma? Tuqεa as, teţţḥuf kan amek ara yi tessenser g xxam, maḥla.
Mi wweṭeɤ ɤ wigi, ufiɤ tamɤart tesεa tmanya d dderya: “ṛuḥ mecṭ as i teqcict, ṛuḥ fk as i weqcic ad yečč, ṛuḥ clil as iceṭṭiten is, ṛuḥ ẓẓey dd tafunast, ṛuḥ jmeε izamaren, ṛuḥ ssu yas i lmal i-hinna, ṛuḥ zzey dd tiɤeṭṭen, ṛuḥ ssend, awy dd isɤaren, awy dd alim g nnar i lmal, kkes dd timzin g tesraft a nεll iẓid g tsirt, ɤerbel awren nni, εll it g tecuyt…“ Ixeddamen, ifellaḥen. Ayt uxxam am jṛad akkit…Amɤar ameqqran iţţak aɤ dd tiqqit n zzit s lqanun… A wi yerwan aɤrum “!
Εyyu…Nectaq ṣṣabun a neclil icceṭṭiten nneɤ, inğan … G acḥal d id sen g xxam!
Iţţewwiq fell aɤ yiwen, iqqel fell aɤ Mohand d ṛṛay, d neţţa kan i d Ŗebbi; Baba s g tama, neţţa g tama. A ḥeqq Ŗebbi ḥaca ma rezfeɤ dd axxam nneɤ ara ẓreɤ lqut n yirden, ḥaca ma tewwi yi dd tmeţţut n gma: A nεll afṭir uqessul, tibuεjajin… Umma deg wexxam nneɤ ma nessen iḥenţ, ḥaca tin yurwen. Iceṭṭiten: Ṣṣabun nectaq it haca tin isεan argaz i dd yeţţakren, a s dd yawi ṣṣabun… Tilkin, tifawtin, usu n teckaṛt, εbbi… Nessalay dd g tesraft a nettεbbi f uεrur nneɤ, selxent akk tuyat nneɤ.
Welleh ar cfiɤ asmi tlul yelli tamenzut, ifka dd Ŗebbi lehwa ar d iḥemmalen, nniɤ as almi ineqlab dd lqermud fell i. Yiwen ur tufiɤ deg uxxam ad igen ɤur i. Argaz iṛuḥ ɤ Uɤbalu a dd yawi lqecc iw sinna, iṭṭef it din lḥal, asif ikkat iţţ g rrif ɤ rrif, ulamek ara dd iεddi.
Tamellaḥt tenna k:
– “Wellen lukan teyra dd lḥemla tewwi Meqqran welleh ar taqicit ayi ḥaca d nekk ur ţţ neyri g lkanun, alamma ddemeɤ ţţ idd yriɤ ţţ g tergin, ḥader ad teţţrut fell as, ha-t-an ur yi teεjib ara, εussen t a dd iwelli ad εellen ssbuε ass n sebε yam, ulac it!”
Εeddan yumayen neɤ telţ yam s wamek tεedda lḥemla nni, izger dd, iwella dd.
Asmi i dd iwweṭ, nniɤ as:
– Ha-ţţ-an, a nanna Tεssadit ur ţţ teggareṭ ara g lkanun ah!
Ṭallayeɤ, akken ara zreɤ tili tεedda kan ad ferḥeɤ a s iniɤ ahat d ḥedd i yi dd yewwin ciṭuḥ n lqut, neɤ n lqahwa … Ulac!
Aţ-ţruh yiwet g issi s n Mohand a yi ţ-ţini:
– Acu ara m dd nεll?
A s iniɤ:
– Σeddi aţ-ţεemreṭ timqeṭṭeft neɤ seksu!
– A ɤ dd ğğet kra i nekkni neɤ i kem kan i umi ara dd nesserkem?
Teţţwaɤ asen tsirt, ulac anda ara dd ẓden din, inɤa hen cceṛ. A s iniɤ:
– Aha εemmer kan i kemmi, tεelleṭ iyi dd ciṭuḥ, awy kan sserkem asen i lwacul timḥemmeẓt!
Almi d yiwen wass, ikcem dd, inna k:
– Iwacu i s teččureṭ akken aɤerbal i Faṭma tura?
– Ulac! Ẓẓadent g xxam, hegganţ taccuyt, sserkmenţ ṣṣebḥ ayi…
– A kem idd wajhen wajhayen a tin f acu ţaţţanţ lxalat, welleh ar lukan d nekkini, lukan aţ-ţεeddi fell asenţ tmacint ur senţ fkiɤ akken tisserkemt anecten, ahat tenwiṭ a kem εellent g meẓẓuɤ aẓelmat…Tecfiṭ mi ara yili txeẓret ɤer tewwurt, yiwen ur dd isteqsi fell am, aɤrum n temzin a m t idd awinţ, ulaḥedd, tura ayen i m dd rran imawlan im teţţakeṭ asent a t sserkment nuhenţit a t ccenţ!
– D Ŗebbi xir, ṭixxeṛ asenţ kan, welleh ar nc-alleh ayen ğğiɤ akk, almi ifka yi t ṛebbi d ṣṣeḥ i nekki, fkiɤ asent wah, tuqεa i!
Ha-ţţ-an, ha-ţţ-an teqqel dayen teɤli dd lehwa, neqtaεen waman. Ansi ara dd awin tiqqit n waman a ɤ ţţ idd aymen, ulac…! Kkreɤ weṣṣaɤ tameṭṭut n dadda Slimane, (a s iεfu Ŗebbi), nanna Tawes, nniɤ as:
– Ceyyeε yi dd tacmuxt n waman!
Neţţa, ayweq iṛuḥ a dd issew i yezgaren, a yi ţţ idd iččar g tala, nuhenţit ssendayent kan, ţţekkesent dd adfel (iẓẓan n yuẓat f lqermud akkit, ttεuffuɤ aman nni). Iṛuḥ a yi ţţ idd iččar: aḍ-ţruḥ tmeṭṭut n Mohand, neţţat teţţinit s Brahem.
– a yi dd-ţefket tiqqit n waman, a Louisa?
(« Ah ya mrebbi nnwenţ, anda ara rewleɤ! Ayuh! Ma yella aman daɤen d-ţuţţra!”). Almi fkiɤ as afenğal i tinna ad-ţsew, ad-ţṛuḥ as tini i tayeṭ:
– Nekkini swiɤ dd g xxam n Louisa aman n tala!
– Nekkini ur yi dd teţţakeṭ ara kra a Louisa?
Aḥeq ṛasul llah ar εellent yi d ccɤel, tacmuxt, awal ssin kan a yi ţţ sqiṭṭrent. A dd yini neţţa imir:
– A kem idd wajhenţ! Naɤ nniɤ am i kemmini, i yejeɤdanen im helken, a henţ an ad ssemdint icmax ɤer tceṛfin, a dd kksent sufell wexxam adfel a t ssefsinţ, tixxeṛ asent ad ččent, luẓent, nuhentiţ seḥḥanţ!
As qqareɤ:
– Tixxer asenţ kan, fk asenţ kan, d Ŗebbi ara senţ ifken lada!
Almi d yiwen wass, ţţfeṛṛḥent, asmi sεiɤ tmentac n yum s yelli tamenzut, ţţfeṛṛiḥent g lkuri n tegmart, tawalit kan akka, am uxxam ayi tura, sseḥmant din lherhari: « Herher, herher, herher », nekk ikker yi dd yiwen lεeğeb d aberkan, nniɤ as:
– D acu thedderemţ? A dd aseɤ ad feṛṛḥeɤ? Kunemţit tekkermţ dd ur wwiṭen fell awenţ ṛebεin yum? Da i ḥedreɤ: Ilul Omar, ilul Brahem, ilul Rabeh, ilul Bezza, tlul Btitra, d lmuḥal yiwet zzey wenţ tekker dd ur wwiṭen fell as ṛebεin yum aţ-ţruh aţ-ţfeṛṛeh g addaynin! Nekk a dd aseɤ ad feṛṛḥeɤ! Fell i i teskukutemţ tura, tectaqemţ iyi lqut, ur yi dd teţţmektayemţ s lqut, aqli-n sserkameɤ iman iw lqut, ad rnuɤ a dd hwaɤ ad feṛṛḥeɤ g addaynin!
Tekker dd Aldjia tenna k:
– Uuuuh! a wliţit, nheddeṛ kan, ayweq i dd yriṭ akka ticcert im, d acu tesliṭ?
– Teqqaremţ as “Neţţat aḍ-ţečč aţ-ţheẓẓez », d acu heẓẓezeɤ? D acu i yi dd-ţefkam g xxam nnwen, naɤ d lqut n wexxam n baba i ţeţţeɤ, d ayen i yi dd wwin wexxam n baba! Alammi kan imir lsiɤ taqendurt ssufell n nnfas nni, uzzeleɤ ddmeɤ aswal…
– Aaaa…! Taqcict im ad-ţemmag taberkant, aḍ-ţţ-ikkat ṣṣer!
– Ad ig Ŗebbi iwwet iţţ qerhu wellahu ibern as aɤellab! Mi yefkan imawlan iw ɤer tmes akka am ta, εelmeɤ acu ara yi aɤen! Σemmeremţ iyi dd ad abbaɤ!
Ţedduɤ ad εemmereɤ s ifassen iw, teţţgalla zeεma zeεma « Tmermacit » a s iqemmec Ŗebbi allen is ur yar haţţ-an iqemc as tenţ!
– Aḥeq wi hin s wi hin ur tεemmereṭs ifassen im ẓẓbel, kem d nnafsa, ur wwiṭen ara fell am umma d εecrin yum!
– Awi dd kan ɤer da, awi dd!
– Ihi ax aḍ-ţabbaṭ xir, ur ţţeεmmiṛ ara s ifassen im, ibeccan akk, kullec!
ɣliɤ g ţţbel imiren, ssiweṭ, ssiweṭ, ssiweṭ almi d ḥewseɤ rebεa lkuriyat: Tagmart, izgaren, ulli, lehwayec; alammi d leεca kan imir, tenn ak tawla ţţef ɤer ɤur em, tekkat iyi almi semmum lqares iw, g εeyyu nni akkit. Azekkuyen imir nni, ur teldi ara akk tewwurt iw. Ikker dd neţţa, iffeɤ kan, tawwurt nni tṭbbel, almi d azal n leḫdac, ha-ţţ-a truḫ dd Aldjia:
– Ass a ur tleddi ara tewwurt ayi?
Ggummaɤ a s dd rreɤ awal, tekcem dd, tehwa dd g umnaṛ nni:
– Uuuuuh! Ur tekkir ara ziɤen maṭi!
– Ma teţţεmaremţ g Ŗebbi, win i kunt idd ixelqen, tixxeṛemţ f ẓẓerb iw, ur yi ţţlaεimţ ara!
Kkreɤ imir nni, amek xedmeɤ, ceyyeɤ ɤ Uḥemmam Tamellaḥt, wessaɤ ţţ, tusa dd Ţata n dadda Slimane, εemmereɤ as ssmid nni i yi dd win akken, ɤ ucwir, subbaɤ as t g ceţţit, truḥ tewwi t. Σellenţ iyi dd tibuεjajin g Ḥemman d ufṭir uqessul. Akken ara sserkameɤ, aḍ-ţruh Aldjia, aḍ-ţesbur taqendurt, a yi ḍ-ţeqqim zzat lkanun bac aḍ-ţečč, aḍ-ţyer taḫelqumt; neţţat teţţinit s Brehem. Ma tesraḥ dd tassemţ griɤ kra ɤer tdeqqit nni kan, ad-ţemxel ad-ţruḫ a yi tcrex iṭaren is ɤ lkanun. Nekkini, d ccetwa, la yasɤar, la tuqqit, neţţa kan ma yeceḥlef dd kra g lexla, a yi dd clex iṭaren is ɤer lkanun, wa dd-ţxeẓẓer ḥaca ma kkseɤ dd i terbuyt nni a dd sserseɤ ad ččeɤ, wa dd-ţečč yid i imir.
Ŗebεa u εecrin yum i tekka zeg i tawla, almi wwṭen rebεin yum, tusa dd tmeṭṭut n dadda Slimane (Ass n rebεin yum, tameṭṭut a dd asen imawlan is a s dd awin afţţet), teččur dd acwir almi yeqqar « kkes dyi », teεlem axxam n wejṛad, terna yi dd tlatin n tmellalin, tewwi dd lexleε, nneεneε, kullec s ɤur es, wweṭent dd, tesṭbex imiren temɤart tameqqrant tiḥbal n lmerqa, acḥal jebdenţ, teqqar yi dd tmeţţut n dadda Slimane:
– D acu d-ţiqdiwin ayi?
Ḥkiɤ as ţţ idd akken tella, tenn ak:
– Aḥeq ṛasul u Llah ucbiḥ; aḥeq Sidi Lbacir u Lğudi, a lukan εelmeɤ ţţ akka, ur dd hennaɤ, ur dd zgireɤ, tilaq mkull ṣṣbeḥ a kem d-ţaweţ Tata neɤ Fatima s ucwir, tibuεjajin d-tiḥmayanin, afţţet d aḥmayan ! Wwiɤ asen dd ɤer da ziɤen ad xeṛfen i nuhni, yerna teţţakeţ asen awren! Nuhni εellen igennuren i tserfin, kemmi teqqar am fk yi liṭra a s εelley tamṭluεt i wemɤar, teţţaţţa fell am!
Tejbed zzey i tawla acḥal, d abeḥri i dd ţţefeɤ g nnfas, tabeḥriţ nni n uyudi akken ara neffeɤ i tewwurt n beṛṛa, aswal nni g uεrur iw almi ţţṛuḥuɤ f udem; almi d leεca kan imir tenn ak ţţef ɤer ɤur em, nsiɤ imiren g sseṛsaṛ acḥal teţţijjiq yelli, la ayefki, la kra, baqi Ŗebbi d aɤyyaṭ: Jjiɤ, la ssḥur, la lketba ɤ uderwic, rğiɤ Ŗebbi lammi dd kkreɤ; Iqqel dd uyefki nni, teqqel dd ṣṣeḥḥa nni, kulci yella…
Ha-ţţ-an, ha~ţţ-an, daɤenni almi lliɤ s tadist ti s ṛebεa, wayi ibɤa ad iṛuḥ ɤ Fṛansa, ixdem iyi yiwet lmizirya d-ţaberkant. Nekkini yusa dd dadda, inn ak a dd rezfeṭ, iluεa amɤar ameqqran, inna yas:
– A s dd serḥem ad-ţerzef!
– Ah! A mmi, mazal, wi hin, ti hin, axeṛṛub a dd yeɤli, d lweqt a t nelqeṭ!
– Ah! A dda Cherif, aseggas, tzemrem a s dd serḥem umma xmesṭac n yum!
Yerna iwwi yasen dd taswalt n tẓurin, neḥcamen zeεma zeεma, inna yas umɤar:
– Ruḫ, ar ass n lḥedd naṭen a mmi, a dd-ţass.
Almi dd izzi lḥedd, iwwi yi wayi yennu, ruḫeɤ. Dadɤa jami yenna yi dd awal ar ass a d wazekka « ad ruḥeɤ ɤ Fṛansa ». Iṭṭef dd abrid is ɤer da, iceyyeε yi dd lmeftaḥ n ufniq iw i mmi amenzu, iwwi t idd g nṣaf n wazal meskin, kan a t aya iwweṭ dd abḥal d anejdam, tekker tmeṭṭut n dadda meskinţ teclal as akw iṭaren is, teclal udem is, tefka yas ičča, tenn ak:
– Wayi tura d ḥayaţ?
Nekk, a dd ččarenţ wallen iw rriɤ tenţ, a dd ččarenţ rriɤ tenţ baq ad εelleɤ lkuṛağ kan balak ad ţţruɤ, nniɤ as:
– A mmi, baba ak anda lla t?
– Wissen, ifka yi dd lmeftaḫ, inna dd azekka awi yas t i yemma k!
– Ihi baba k ur dd iţţeqqal ara leεca?
– Yumayen tura ulaḫedd it!
Qqimeɤ dinna azal n ţemneyam neɤ εecreyam, iban dd lexber qqaren as « Sipuṛsa ig yewwi ameṭṭuḥ is ɤ uxxam n baba s, neţţa iṛuḫ ɤ Fṛansa, tura a s dd iţţceyiε lbaččat i lalla ad-:ţečč! » ussan nni ímenzuya tesâezzez iyi tmeṭṭut n dadda : Ma ur dd nniɤ ara d acu ara yemmagen d lqut ad-ţeţţmayad kan: « D acu ara nεell a Louisa d imensi, d acu ara nεell a Louisa d lfaṭur? » alamma nniɤ dd. Lamaεna asmi tesraḥ s wakka waqil teqqar as d-ţidet a ţţ iğğ dayi, dayen tessers imir nni cwiyya ur teţgalla ara akken f lεic; Tayendurt is tiswiεin tberren, ad-ţeɤli g Ṭitem is ad-ţewt íţţ, f ulac kan ad-ţeddem-iţţ ad-ţezzembel-iţţ meskinţ.
Nekkini imiren ad sserseɤ i ymeṭṭawen g uxxam nni uksar: ad hwaɤ ɤ uxxam nni n wadda, din kan i ţţafeɤ abrid, ad wweteɤ almi fɤenţ dd walen iw d-ţizeggaɤin am tqeddidin. Ad-ţruḥ nanna Zineb meskinţ, tini dd:
– D acu d lεar ayi i m ixdem akka Meqqran a Louisa, acu d-ţiqdiwin ayi?
A nehḍer nekk d id es alamma tessejba dd kan tmeṭṭut n dadda a nessusem, neqqar as a s tini “fell aɤ i thedder Louisa”.
Traf, traf, traf, traf, almi dd ikteb tabraţ, iktb iţţ idd ɤ Uɤbalu i baba s, inna yas « ruḥ awy dd axxam, balak a hen ţeğğet g Umasin axater Mohand ad ífqeε daɤen ad-ţţ iwwet am ubrid nni amenzu ».
Traf, traf, traf, isewweq dadda Slimane (a s iεfu Ŗebbi ma yexdem d acu f ara s yeεfu, a s ţţ icnef Ŗebbi ulamma, g laxert), immuger amɤar ameqqran inna yas:
– Meqqran ulaḥedd it, Akli iṭelb dd tislit is a ţţ irr ɤ Uɤbalu, abrid a ur teţţeqqal ara axxam iw, ur teţţeqqal ara ɤ Umasin!
(Aaaa … iwẓat iw ğğiɤ ten g Umasin, mmi ğğiɤt g Umasin, lqecc iw ílkel acemma ur t wwiɤd id i, amek ara ṛuḥeɤɤ Uɤbalu akka?)
Amek, amek, amek, inna yas:
– ad ceyyeεr Amara!
Iceyyeε Amara, iṛuḥ iwwi dd lqecc iw g Umasin bennun tala, ţţqeεden ţţ tella d abergenniṭ kan ilkel, d lexla kan; εeddan imir wwin as ssaneε; íbna ţţ akkit zeεma zeεma. Iwzaṭ, ur sen tessuffuɤeṭ ara leḥsab d acu sεanţ, nekk sεiɤ ṛebεa, kkrenţ, ṛuḥenṭ wwinţ dd tayaẓít iw, ččant ţţ d-ţayaẓit iw i dd ttefenţ, zlanţ ţţ, aheq rasul u llah ar d agla w i dd wwinţ, nnanţ as:
– Ah! Tenwiṭ ad-ţeqqel, a wer dd qqel, neţţat tura tṛuḥ iwẓat is, arğu, d aya i nelḥeq zzeɤ es!
Dawya, lukan a senţ tserreḥ, a s tinit d-ţiɤeṭṭen, d leεğeb i texdem, quqanţ dd tayaẓit iw, wwinţ ţţ ɤ tala, zlanţ ţţ idd f aman nni, wwìnţ ţţ idd axxam, ččant ţţ.
Asmi dd ceyyεenţ tlata tewẓat, nniɤ as:
– Tella tyaẓit ti-s-rebεa ɤur i, anida tella a dd ɤli!
Tekker tmeţţut n dadda:
– Ḥmel Ŗebbi imi ur m zlinţ ara mmi m! Teţţruṭ f tyaẓit, teğğit tenţ ɤ tnuṭatin d-ţemɤart, tεelmeṭ d acu ara kem yaɤen!
Dayen briɤ i wawal, ččanţ ţţ, baqi ma d ssmaḥ ɤ Ŗebbi welleh ar ulac.
Wellaɤ ɤ Uɤbalu, ğğiɤ Amasin, yusa dd imiren Amara. Iwwi yi dd timṭerḥt iw, ar iεell iţţ idd g tɤemmuṛt uzembil, temmerwal lḥelfa nni, akka kan d-ţiberdudin, iččur d inğan, iεell iţţ idd g zembil, inna dd:
– Ssetḥaɤ amek ara ţţ idd awiɤ abrid abrid g win Umasin almi d Aɤbalu!
(Axater a ţţ iseεeddi f Leqser). Baqi iwweţ dd, ssiɤ ţţ, claleɤ acţţit nni, claleɤ lḥelfa nni, εelley ţţ g swalen, acţţit nni iqgel dd icbeḥ a s tiniṭ d lekdeb mačči d win, (Rriɤ ɤ lεemer iw lemṭerḫ iw); Mmi iṛuh dd ɤer din zzat iw. Baqi wì yeţţefen g Ŗebbi ur yeţţeɤlay ara (I s qqareɤ d-ţiswiεin); Qqareɤ as; “Ya…Ŗebbi, nuhenţit ig ţţḥufen a yi ctiqent aɤrum a henţ iğğ Ŗebbi g weɤrum nni aberkan g acu teţţeddu umma d-ţarfa n wulli, nekki ya baba Ŗebbi aqli k teţţwaliṭ, ul iw yeṣfa, ul iw zddiy, xedmeɤ f ubeẓtuḥ, f umeqqran, f ulemmas, ɤ ayen ɤer es, ţţefeɤ a Ŗebbi zzey k wissen ahat a yi dd-ţefekeṭ taxbizt d-ţalegɤant! Afudi, afudi, nuhenţit mazal ihenţ dinna, nekk aqli-n, iεell iyi dd Ŗebbi abrid, iεell iyi ţţawil, lḥemd u lieh a Ŗebbi, ţţefeɤ taxbizt s ufus iw, bṭiɤ ţţ i warraw iw ur yi dd yexẓer yiwen!
Ruḥeɤ ɤ Uɤbalu imir, nexdem dinna daɤen lammi kan nṣaf n yiṭ, isqerbub dd ḥedd, neldi ţţ, nufa t d neţţa i dd iwllan, nenna yas:
– D acu n dεussu, tura seţţ chur teţţazzaleţ, d aliritur kan i teţţawiţ?
Inna yas:
– Sliɤ i jeddi iqceε ikun dd, fneε, ţrek…
Ikker jeddi s inna yas:
– A-ţţ-qecεeɤ, ad qecεeɤ Akli ad muɤ arraw is, ḥedd ur iţţayal g Uɤbalu, ma ijmeε it dinna, dayi g Umasin ig illa ccɤel, irwel, ameṭṭuḥ is ulamek ara yili dayi, tura iṛuh ɤer dinna, d nekk i sen yeţţaken aɤrum, a sen ctiqeɤ aɤrum, d lmuḥal d lğilali a sen fkeɤ aɤrum a t ččen …!
Traf, traf, traf, ur εlimeɤ ma d aseggas neɤ d εamayen, teɤli dd lgirra… Neţţef abrid nneɤ nṛuḥ nerwel ɤ Umasin, ad-ṭeẓreṭ lmektub n Ŗebbi, rweleɤ ɤ Umasin; isserwet Aɤbalu, almi yesbedd alim nni, neṭṭef abrid nneɤ ɤ Umasin (Dey s lgirra, dey s a hen iεwen). Ŗuḥeɤ ɤer dinna, ufiɤ ixxamen akka i ččuren: Wa d-ţibeţţiyin, wayi d-ţickarin n nneεma ta ɤef ta, nuhenţit akkit g ixxamen nsenţ. Kkiɤ g uxxam nneɤ xmeṣtac n yum, dinna i εeydeɤ, dadɤa win isselsen i dderya s « antirdi « , nuggad imjahden a ɤ zlun, balaket lḫenni, balaket kullec. Tameṭṭut n dadda meskinţ teqqar dd:
– Amek ara nessels i teqcicin ayi, amek ara senţ nexdem?
– Qqim kan almi ineṣṣef was a nẓer!
Ikcem dd Mohand inna yi dd:
– Wah tiqcicin ayi akka s inğan ara qqimenţ?
- Nuggad!
Teqqel tessels asenţ Yamina, tessels i yess is d issi, nekka dinna temneyyam neɤ εecreyam, iεdda lεid. Nwella ɤ Umasin, tεell iyi Yamina lesfenğ, nṛuḥ ɤ Umasin. Wweţeɤ ufiɤ ixxamen ṣtalin akkit, anida ara yneɤ, anda ara dd qqeleɤ tura ɤer da, ulac. Ikcem dd umɤar g lexla, yufa yaɤ dd nessummer i yiṭij g fray zzat tsraft, inna yi dd:
– Wah teqqimeţ din a Louisa! d-ţiɤimit i kem dd iṭren?
– Aqlaɤ neqqim neţţawi timεayin!
– Ŗuḥ ad-ţberzeṭ ḥedd n texxamin anda ara tberkem!
Ṭickarin, ahat taneggaṛt nni zzey s seţţa sebεa lgelbat, neεdda imiren, tεawen iyi Dawya, ewwet, ewwet, ewwet, lammi dayen iṣṣerser yiṭ s wameK i dd sbaneɤ taxxamţ. Mi dd sserseɤ aḥayek g lqaεa, εeddi ad-ţeyneṭ a taṛwiḥt! Lbeqq, iṭ kamel neţţa yyebbed g uksum nneɤ, alamma yesbeḥ imiren ur isbiḥ f sseεd iw, ruḥeɤ ddemeɤ aɤerbal akken tafţţaḥt tarezzaqt, ɤziɤ dd akal, ekreţ, ekreţ, ekreţ, akal nni d amellal a s tiniṭ abḥal d lğebs yuεer i tɤuzi. Ehres, ehres lammi t sneɤdeɤ, sukkeɤ t idd g uɤerbal, wwiɤ dd imir tarfa g lkuri yezgaren, exleṭ, exleṭ, selɤeɤ ţţ idd g yiwen wass, fukeɤ ţţ texxamţ nni, temmug dd d-ţaxlaft, inna yas umɤar ameqqran:
– Ad ṛuḥeɤ ad gganeɤ zzey s!
Inna dd kan akka ziɤen zdeffir, almi yesla yi εyṭeɤ, issusem. Zedɤeɤ dinna waḥedd n cehrayen neɤ tlata lammi dayen berzen akk annar, neqqel daɤen ɤ lxedma nni: Sseww dd i yefellaḥen, ẓemmer zeεter, alammi dayen selken akk daɤen sbedden ddwams nni.
Σεddan kra n wussan akkenni, lexrif issenṭi, zwin dd, fsren kra g tnedcin, ur neţţruḥ ara ɤer din ɤ unnar, axaṭer mazal ixxeddamen, alammi selken akk ixedammen nni, ruḥen wellan, d nkenţit ig ţţṛuḥun a neqleb tazart d iẓedki, kra f yidles, kra… Tenna k Aldjia:
– Ya dd nekk d idem a nṛuḥ; Dawya ad-ţerr taccuyt i yelli ad-ţnawel.
Nṛuḥ nekk d id es a nejmeε tidencin, ixẓer iyi dd umɤar ameqqran, inna yi dd;
– Tusiţ dd ad-ţejmεet tazart!
Ssusmeɤ, ggummaɤ a s dd rreɤ awal, d amɤar ameqqran,ur ssineɤ d acu ara s dd rreɤ inna yi dd:
– I kem i umi dd qqareɤ, ssers tidencin nni!
Tekker dd Aldjia tenna yas:
– D nekk i ţţ idd iwwin a henţ dd nejmeε, nuggad lehwa!
– Tazart, ha-ţţ-an ičča ţţ uyṭit, teţţeɤlay dd ɤ lqaεa, iţeţţ iţţ lmal, ulaḥedd menhu ara ţţ idd ijmeεn, argaz im iṛuḥ iṭṭmenṭar, kemmini tura tusiţ dd a yí tjemeεṭ tin illan da g uxxam! Tayi nni íllan g uxxam ur ţţ tallas ara, d nekk ara ţţ i jemεen iman iw!
Baqi xedmeɤ ccɤel iw lwaḥi d Aldjia. Wellaɤ dd, newweṭ dd, nečča imensi, nessusem, tεedda. Azekkuyen ṣṣbeḥ nekker dd, snat ad ssewwent (Yiwet ad-ţerr aṭajin, tayeṭ ad-ţesseww), snat ad ṛuḥenţ ad ḥewcenţ tazart, dayen ixeddamen ibeṛṛaniyen wellan, neqqim uḥed nneɤ kan, ayrur d agla nneɤ g lexla, nekker, nekk d Aldjia, nṛuḥ neğğa Dawya daɤen tεus as i XuXa ad-ţesseww, XuXa d-ţabeẓtuht tḥeffeṭ, Bṭiṭra, nεell as tibeţţiyin g acu ara dd-ţayem: Mkull wa acu ara dd yexdem daya. Nḥewc dd, nekkes dd tibexsisin yeqqimen, tiṣentiyin nni akken tisemmaṭin lεali, newwi henţ idd i wučči, ifessasen nni ilkelli yeqguren g ixfiwen, nzeggen taswalt, newwi ţţ idd, ur nteyyir ara, ayen nufa g lexla newwi t idd d rrezq. Mi dd newweţ, nekkes tibexsisin ɤ uɤerbal akenni din g ufray, tenna k Aldjia:
– A Ŗebbi a Louisa, xemmem, hwa d aksar akkin a hen tesmireṭ g tdenceţ ifessasen ayi!
Anda ṛuḥeɤ a t afeɤ din! Meεna ulaḥedd ccɤel, ass kamel isummer kan, da ɤer da, a s tiniṭ d ẓẓerbut, di hin di hin kan, hwaɤ seddaw texxamt nni yewẓat, ẓriɤ t din, ţţedduɤ a dd qqeleɤ, uggadeɤ t, εelmeɤ acu ara yi ixdem; lammi dd ibren zdeffir, iẓra yi dd, inser iwwet aqqerruy is g rrif, baqi dehmeɤ, Idiɤ tawwurt nni, kecmeɤ, akken ţţedduɤ a hen smireɤ kan, ijebd iyi taswalt nni, iwwet iţţ, taswalt nni tṛuḥ, ifessasen nni ddan akenni acḥal g lqaεa, inn ak:
– Ur kem uḥwajeɤ ara ad-ţekcemeṭ ɤer da!
– Ihi stahfir lleh a Ŗebbi, ṭelmeɤ, ufiɤ ten g lexla jemεeɤ ten dd, rrezq ideεεu ɤ Ŗebbi!
Wellaɤ dd axxam imiren, ɤliɤ g imeṭṭawen, tibexsisin nni d lmuḥal kkanţ g tgeṛjumt iw. Tekker Dawya tenn ak:
– Ah ula d kemmini teţţεanadeṭ t!
– Inna yi dd iṭelli, ur fqiεɤ ara, tura ikkes iyi taswalt n ifessassen ger ifassen!
– Tixxeṛ as, d rrezq nni, d Ŗebbi ara t idd iwweten!
Tesliṭ as! ggummaɤ ad ččeƔ lqut ass kamel, nuhenţit:
– Ah! lεic ayi d acu i m yexdem, naɤ d ddnub!
– Σeddi sṭer it, iggumma, iggumma!
Ssewwenţ lğwaz n ţexsayt, iqqim g teṛbuyt din i yiṭij kan g fray. Teţţru yelli, kkereɤ, wwiɤ tamejlubt, ṛuḥeɤ a dd εemṛeɤ, akken kan kkeseɤ i tdeqqit nni, win ikcem dd, inna dd:
– Tεerraṭ f iɤallen im, ah! Ad-ţεemmeṛt lğwaz i tarwa m, ah! Tesseneṭ tarwa m, babat sen iṛuḥ iţţnemṭar!
Ggummaɤ a dd neṭqeɤ.
– Lukan ur ṭalleɤ ara d ddnub ɤ Ŗebbi f lwacul nni d ibezṭuḥen, ur εlimen d acu ig ṭran, d walmi smareɤ am taxsayt nni f uqerruy im!
Baqi aḥeq rasul u llah ar wwiɤ-ţţ idd, ar ččan warraw iw:
Nekki lliɤ s tadist, ɤliɤ g meţţawen daɤen, ewwet, ewwet, ewwet, ha-ţţ-a nanna Rosa, a s iεfu Ŗebbi, tewweṭ dd g Ireẓman, trezf dd, d ṣṣif, tewweṭ dd, tufa yi dd akkenni:
– Uuuuuh! Lukan εelmeɤ akka, tilaq ma usiɤ ţţ idd (Axaṭer nanna Rosa teţţḥibbi yi, d lεeql is), baba, ur iţţağğa lεar is, baba akka kan i d neţţa, baba, g
wasmi temmut yemma ibeddel sebεa wudmawen…!
Teţţru d id i meskinţ (A ţţ ig Ŗebbi g lğennet) teggull alammi ččiɤ g terzeft nni ines d-ţamezwarut, tewwi yaɤ dd timsemdin, ččiɤ dayen tṛuḥ tluft nni. Neţţa, axater tesseṭsay; Mi ara theḍḍer, medden ak ad beccen iserwula nnsen, teţţqessir, teţţlus aserwal… Xxah, xxah f lxalat!
Article destiné à la revue Littérature Orale Arabo-Berbère 19-20 (1988-1989).