01/09/2024

CONTES DU RIF

HAMADI, Récits des hommes libres. Contes berbères, Paris, 1998, 252 p.

(Aït Touzine, nord-est-Maroc)

Conte: «Amour fou et trahison» (p 11): 99 têtes de personnes tuées empalée sur des roseaux le long du chemin par le héros-noble-parfait càd un grand guerrier (20). Ces roseaux forment une haie. Chaque tête dit «Maudit soit Moussa l’Arabe et maudite sa parole!» (22). – Il y a 7 points cardinaux (28). – Perfection esthétique de l’ogre (blond, dents régulières…). – Accès par un puits pour arriver au royaume des miroirs. Le héros descend jusqu’au fond du puits où il trouve une terre verdoyante. Chaque fois qu’il croise quelqu’un qui éprouve de la sympathie pour lui, cette personne se transforme en son sosie et devient pour Mazouz miroir de ses forces et de ses faiblesses. Une vieille femme, assise à l’ombre d’un figuier, se repose entourée de 7 filles. A sa vue, toutes se transforment en 7 Mazouz différents. «Etrange chose qui m’arrive, étrange terre où je ne rencontre que moi-même» (30). [La vieille s’appelle Rabiɛa = Herbe].  – Le héros parle avec la mère et lui dit qu’il vient chercher l’eau de la vie. Il remarque l’éclatante beauté de la plus jeune des 7 filles. – La vieille lui dit «S’il venait à t’arriver malheur, demande qu’on rassemble tes os et qu’on me les envoie». Elle lui donne l’eau de vie. Il la rapporte à sa fiancée Mazouza qui en arrose les corps des 7 ogres tués par le héros. – Les ogres ressuscitent et font prisonnier Mazouz le héros. Il pleure de tristesse car il voit que Mazouza l’a trahi → Il demande à Mazouza de rassembler les os et les attache sur le dos du pur-sang qui plonge dans le puits. «Rabiєa dispose les os de Mazouz sur un tapis de laine douce tissé des mains même de Radya la jeune. La mère rassemble les os et reconstitue le squelette. Ensuite, elle enduit les os et les articulations d’eau de la vie. Au bout de 40 jours, Mazouz retrouve sa chair, son souffle et sa parole» (31) – Il épouse Radya. [Ce pays des miroirs serait-il le paradis des guerriers?]

Conte «Basilic, grenade, petite colombe des palais» (p 33): La beauté se trouve dans les longes cheveux noirs jusqu’aux chevilles. «On disait qu’elle se couchait sur la moitié gauche de sa chevelure et qu’elle se couvrait de la moitié droite».

Conte «Royaume de lumière, sang de grenade, reine des fleurs, oiseau qui dit la vérité et qui chasse les soucis» (p 48). [Cf. Allioui «Le royaume de lumière].  –  Nom du bébé-prince: regard incendiaire et des cheveux de feu. Nommé «Sang de Grenade». – Le roi, son père, ébloui par la beauté de son fil ne s’occupe que de lui → son épouse devient jalouse → elle s’adresse ainsi à la lune: «Aussi pour calmer sa rancœur, elle prend une grenade, l’ouvre, dispose les grains sur une assiette, les offre au regard de la lune: «Oh, Lune, miroir des cœurs, suis-je la plus belle?» (49). – «Le palais des 7 colombes possède de hautes colonnes de marbre qui soutiennent un dôme de cristal ouvert sur le ciel « (51]. – Pacte de sang entre le jeune prince-enfant et les colombes. La 7e  chambre (interdite) possède une façade en verre et s’ouvre sur la place d’un village → le prince de 14 ans reconnaît le roi son père parmi la foule qui le reconnaît aussi, «je suis dans le palais dominant la rive des eaux, les 7 colombes sont mes sœurs», dit-il à son père. → Père bouleversé mais le palais de verre semble impénétrable. – «J’étais dans la 7e chambre lorsque mon père m’est apparu comme dans un rêve», dit le prince aux colombes. – Thème des 2 montagnes qui se rapprochent → il faut donc enfourcher un mouton qui franchira le passage d’un bond. – Il passe dans le royaume de vérité pour prendre l’oiseau de vérité → il revient dans la pièce de verre où il voit son père vieilli qui lui dit: «Lorsque tu rencontreras la Reine des Fleurs, ton chant sera vivant!» (57). – Mais personne n’est jamais revenu du royaume des fleurs, lui disent les colombes; – Il arrive dans son palais; la Reine des Fleurs a une chambre de lumière → se marie avec la Reine des Fleurs après qu’elle ait été réveillée par quelqu’un → Rapport sexuel immédiat → mariage. |[Cf. Nature endormie puis réveillée en changeant la place des chandeliers d’or et d’argent] (57).

Conte «Enfant qui a la lune… et le soleil…» (p 59): Un enfant fait un rêve qu’il soumet à son père qui lui dit: «à ta droite tu feras asseoir la fille du roi, à ta gauche la fille du savant [càd le soleil et la lune]. Le magicien savant dans le rêve est un coq à la barbe pointue. – Le Tout est: les terres, les mers, les étoiles, ce sont les 3 savoirs.

Conte «Où il est question de 7 clés, d’un foulard qui… gazelle…chamelle…» (p 81):

  • «Les pattes de devant comme le vent, les pattes de derrière comme l’éclair, le temps passe sur cette terre!»
  • Tri par les fourmis de perles de différentes couleurs (88).
  • Reconnaissance de la jeune fille par le héros grâce à un essaim d’abeilles qui va se poser sur le front de celle-ci (89).
  • Marcheur sur l’eau (berger et ses brebis) (90): «Comment arriver au berger sur l’eau?» →» le vieillard de la Tour répond: Tu n’as qu’à penser à l’aimée!»(91).
  • Rite du crachat comme initiation: le Vieillard de la Tour crache dans la bouche du prince → celui-ci désormais comprendra le langage des oiseaux (92).
  • Œuf d’oiseau ressuscite la princesse s’il est cassé sur son front (93).

Conte «Où il est question d’une chouette, âne gris, natte…» (p 161): 2 frères: un benêt et un malin. La séquence se passe dans la forêt, dans une clairière, le benêt voit un arbre énorme, majestueux, il voit houd-houd la chouette. «Quel n’est pas le plaisir de Bahloul de voir enfin cette légende vivante, que l’on ne rencontre que dans les rêves» (164). – «La chouette, à la suite des coups de hache par Bahloul le simplet, descend et va se poser sur une souche d’arbre. Elle se secoue. Un éclair jaillit soudain. Bahloul, éberlué se couvre le visage. Lorsqu’il rouvre les yeux, une femme toute de lumière, le regard légèrement bridé, les vêtements vaporeux et rougeoyants, le geste simple, le toise» (165) →  «Je suis la princesse des entrailles de la terre. Je t’en prie, cesse cette folie. L’arbre que tu maltraites ainsi donne accès au royaume du dedans. Si tu l’abats, jamais je ne pourrai rejoindre les miens. Tous les 100 ans, pendant 7 jours, je quitte mon royaume pour un voyage à travers le monde du haut. Je suis ici depuis 4 jours déjà (166). Tout l’héritage de la Terre est donné au benêt et comprend: l’or qui vient des entrailles de la Terre; les productions agricoles; la massue, symbole du pouvoir et de la justice, càd le bon usage qu’on peut en faire [les bienfaits de la Terre sont pour tout le monde. «Le cadet a hérité des dons de la Terre et en a fait usage pour autrui» (171).

Conte «Où il est question d’une ogresse, champ de fèves, coq…» (p 175): «On disait d’elle que la pluie rythmait le mouvement de ses hanches et que le vol des éperviers n’était pas plus gracieux que le battement de ses paupières» (175). – Coq au sommet d’un figuier. – ogresse habite au fond de la caverne. Elle a 12 jarres suspendues à 2 pieux de bois attachés aux parois de la grotte dont 2 plus grosses que les autres. – L’ogresse dit à son fils adoptif: «Dans les jarres que tu vois pendues aux parois de ma caverne, il y du vent, de la pluie, de la neige, de la grêle, du givre, des montagnes, des lacs, des océans, du sel!» Et les 2 plus grandes, l’une du miel, l’autre du vinaigre!» (187). L’ogresse pisse dans les buissons où les garçons sont cachés «les 2 frères, assaillis par l’averse, se réveillent en sursaut «Hammou mon frère, le jour du jugement dernier est arrivé, voilà le déluge et nous n’avons pas d’arche!» [Cf. les contes où c’est Anzar qui tombe quand l’ogresse pisse: conte Ntifa:» le chat enrichi» p 50 et Renisio «un homme avait 2 femmes» p 257].

Conte  «De la différence entre le bruit d’une gifle et le son du marteau» (193): [Discussion entre Djeha et un savant venu du levant où l’on voit 2 conceptions différentes]: «Le paradis est pour les hommes de bonne volonté!», dit le savant; «il est aussi pour toutes les créatures!», dit Djeha en montrant son ânesse (195).

Conte «Où l’on raconte l’histoire de Douceur de Colombe, Silencieux…» (p 212): Parmi 7 frères, les deux derniers partent pour travailler et aider leur père qui leur recommande de ne pas rentrer au service d’un homme aux yeux bleus. Ces 2 frères s’appellent «Douceur de Colombe» avec des yeux embués et le teint laiteux identifié à la colombe, l’autre s’appelle «Silencieux comme rosée du matin», sûr de lui, belle prestance, regard acéré, oreille qui lui fait repérer le bruit le plus ténu à 100 pas à la ronde (identifié au renard) (213).

Conte «Où l’on raconte l’histoire de 2 frères, bol de henné, arbre qui meurt» (p 221): [Cf. l’histoire égyptienne des 2 frères].  Le 2e des 2 frères s’en va et recommande à l’autre de voir la source et l’arbre qui, s’il est desséché annonce une mauvaise nouvelle concernant l’absent. Le 2e frère débarrasse les bergers des animaux sauvages et est récompensé par le don d’animaux domestiques (chevreaux, veaux, agneaux). Il trouve une jeune fille près d’une rivière devant un plat de viande, dit «Je suis ici en offrande au monstre à 7 têtes» – Quand le monstre viendra-t-il?» – «Quand les branches des arbres trembleront, quand une pluie fine et drue tombera, quand les éclairs s’éparpilleront dans le ciel, le monstre arrivera». – Quand il sera là, réveille-moi». Il lui coupe les 7 têtes d’un coup. Il se retrouve chez l’ogresse. – Puissance du lait: l’ogresse arrose de son lait  un seau de viande fraîche et un autre de grain [pour le lévrier et pour le pur-sang]. Les animaux mangent puis partent avec le héros → l’ogresse pétrifie les 2 animaux par la formule «Arrête-toi mon lait!» → Ne pouvant plus avancer, le héros est dévoré par l’ogresse (224). L’autre frère voyant la source à sec et l’arbre flétri, part à la recherche de son frère → tue l’ogresse après qu’elle ait recraché son frère, le pur-sang et le lévrier. «Tous les deux la découpent, plantent les morceaux de sa chair sur la cime des roseaux, les offre aux vautours» (226).

Conte «Où il est question de Zahra l’orgueilleuse» (p 231): Un homme ayant beaucoup voyagé, s’installe en rase campagne et construit une tour très haute. Les locaux en font leur roi. Il s’installa alors au sommet de sa tour et promena son regard sur les êtres et les choses, régnant équitablement sur tout et sur tous. – Quand il est très vieux, il a une fille ayant toutes les qualités physiques et morales, caractérisée surtout par un don du maniement des armes et dans le maniement de l’esprit et du cœur des hommes, s’appelait Zahra → Hommes et animaux devinrent fous amoureux pour la belle dès son plus jeune âge. « Elle exerce une attirance sur tout être et sur toute chose» (232).  – Par un jour de grand froid, elle décide de mettre la terre entière à l’épreuve de son amour → Elle se construisit une cabane de bois vieilli parmi les cailloux du levant, isolée, et attendit. Tous les jeunes hommes se retrouvèrent à sa porte → joutes des guerriers. Zahra pare les montagnes de ses rires, illumine les nuits et les chemins de son regard droit et clair. – Les jeunes hommes, un à un frappent à sa porte, elle demande à chaque fois son nom et le chasse. Zahra tisse une couverture de laine avec les noms de ses prétendants → le temps s’écoule, Zahra vieillit. – Mokhtar, un homme simple entreprit le chemin de ses rêves → il arrive devant la cabane de bois. Il frappe et une vieille femme apparut, petite et menue, fripée, ridée, tremblante, enfouie sous sa couverture de laine. Mokhtar fut ébloui par l’éclat d’une beauté qu’il était seul à voir → il tira sur les fils d’or brodés. Pendant 7 jours et 7 nuits, au fur et à mesure que les noms s’éteignaient sur la couverture, des oiseaux envahirent le ciel. Au bout de ce temps, 3000 oiseaux décrivirent un cercle immobile dans les airs. Au 1er battement de leurs ailes fines et à mesure que l’horizon les avalait, les rides de Zahra disparurent, laissant apparaître l’énergie de son regard et la délicatesse de son teint (234) [Cf. Athéna aux yeux pers et vierge] ≠ [printemps, féconde] [ces oiseaux sont les jeunes guerriers morts qui lui permettent de se régénérer].

Conte «Où il est question de la fille… d’une vache… d’un tas de poussière…» (p 235): Les os réduits en cendres, semées au pied du figuier et qui donne des feuilles bonnes à manger. Le figuier dit à la petite fille: «Prends bien les 7 grenades et n’oublie pas les os d’une mère qui t’ont nourrie et abreuvée!». La colombe se pose sur la tige d’un roseau. Elle chante à l’adresse des serviteurs qui coupent des roseaux: «Ô toi, serviteur, pareil au moissonneur dans les champs, /Coupe, coupe donc à hauteur de tes genoux. /Ô toi, serviteur pareil au moissonneur dans les champs, /Ne coupe pas plus bas, tu couperais de petits doigts, /de petits doigts teints au henné!» (247).